Phonèmes de Iannis Xenakis
Durée
11′
Date de composition
1977
Édition
Salabert, EAS 17347
Effectif
Pour Soprano (ou Mezzo-Soprano) et 8 musiciens : 1(pic, fl A).0.1(clB).0-, pno, crd (1.1.1.1.1)
Création
Le 17.06.1977, Strasbourg, Ensemble Studio 111
Notice
Akanthos (Epines) est l’une des œuvres les plus tendres de Xenakis. La voix y est utilisée comme une autre couleur du tissu instrumental et doit s’intégrer à l’ensemble. Il est également rare, dans la musique de Xenakis, de déceler des zones tonales (modales) tout au long d’une œuvre, or il est fait ici largement usage d’octaves mélodiques qui sont pour beaucoup dans le sentiment d’espace largement ouvert, et parfois sublime, qui se dégage. Akanthos est une musique pré-rituelle d’une époque d’un pré-langage, qui égrène des phonèmes inventés. Il y a en fait des éléments de peur sauvage tout au long, et cependant une conscience aux yeux grands ouverts et affamée de ritualisme – la prochaine étape dans le calendrier préhistorique. Des glissandi s’y insinuent, comme des serpents sortant leurs crochets, dans le limon primordial, la boue suintante et les échappements de gaz bouillonnants. Il y a aussi dans les cordes des résonances préhistoriques de griffures et d’écorchures. Le piano apporte des étoiles somptueusement rutilantes dans la nuit claire d’Akanthos. L’agonie de cette femme désemparée, seule dans l’aube préhistorique de l’humanité, les cris primaux de la fin, les vrilles aiguës de l’enchevêtrement, et peut-être de l’enchantement, laissent l’auditeur frappé de respect pour la sensibilité unique de Xenakis et sa mémoire cosmogonique.
Charles Zacharie Bornstein