Étant sa première œuvre créée en Grèce, dans ce haut lieu de la culture antique, Le Polytope de Mycènes gardera une place spéciale dans l’univers de l’artiste. Xenakis le conçoit après avoir obtenu l’amnistie, grâce à Constantin Karamanlis, en 1974. C’est un retour dans son pays natal, après 27 ans d’exil. Un souvenir d’excursion scolaire à Mycènes à l’âge de 14 ans inspirera un spectacle de lumière et de son sur l’acropole antique et les monts environnants, Zara et Elias. Ce polytope sera joué du 2 au 5 septembre 1978. Le spectacle, qui dure 1h30, commence lorsque la nuit tombe : l’acropole et les collines s’illuminent, des enfants et des soldats portant des torches ainsi que des animaux munis de cloches et d’une diode entre les cornes dessinent des constellations lumineuses dans l’obscurité sur les flancs du mont Zara. Plusieurs œuvres vocales et instrumentales sont jouées : Oresteïa (1965-66), A Hélène (1977), Persephassa (1969) et Psappha (1975), vont résonner sur le paysage mycénien, lorsque l’orchestre-in situ- composé de plusieurs chœurs et d’un ensemble de 14 instrumentistes et 6 percussionnistes les accompagne. Par ailleurs, et pendant les quatre jours de représentations, un chœur de femmes récite dans la phonétique de l’époque antique, des extraits d’Hélène d’Euripide, de l’Iliade d ‘Homère et d’Œdipe à Colonne de Sophocle. Cet ensemble de pièces « grecques » de Xenakis et des récitations de textes anciens s’entrecoupe d’« interpolations sonores », composées de fragments de Mycènes Alpha (1978), œuvre composée spécialement pour l’occasion avec le système de l’UPIC. Des grands projecteurs anti-aériens, des feux d’artifice et des projections de diapositives s’ajoutent au spectacle, dirigé par Xenakis depuis un talkie- walkie. Les 10 000 spectateurs qui ont visité la terre d’Argolide, cette fin d’été de 1978, en garderont un souvenir inoubliable.